Le Pont

La liberté d’opinion est une farce si l’information sur les faits n’est pas garantie. – Hannah Arendt

La vérité sur Napoléon !

Napoleón Bonaparte

Si Napoléon s’était contenté de mourir à Sainte-Hélène, il aurait été à jamais un Grand Homme. Convenez qu’il n’est pas donné à tout le monde d’aller mourir dans cette fichue île perdue. Ceci dit, il a fait bien plus : il s’est fait Juif !

Aussi étonnant que cela puisse paraître, rien ne pouvait mieux assouvir la soif de grandeur de cet homme d’élite, sûr de lui-même et dominé par sa mère. Il ne s’y est pas trompé : rien au monde, en effet, n’est plus glorieux que d’être Juif ! Et ce ne sont pas les amis de Passages qui me contrediront.

Tous les événements inconnus ici révélés sont point par point historiquement véridiques, car fondés sur des recherches effectuées dans la guenizah de la shoul de la Victoire. Tout ce qu’on peut lire par ailleurs sur Napoléon, n’est que pures inventions, sornettes et billevesées.

Précisons que ces travaux ont été facilités par son copain le grand-rabbin Haïm Korsia, corse comme lui ainsi que son nom l’indique.

L’Empereur s’est donc converti lors de son couronnement dans la shoul de la Victoire, évidement la seule digne de lui. Where else ? D’emblée on peut s’interroger sur le fait que le peintre officiel, Jean-Louis David, n’a pas représenté un acte capital qui s’est pourtant produit à la vue de tous. Il est temps de dire la vérité aux Françoïz’n. Voyons cela en détail.

Après s’être coiffé d’une couronne de laurier, en guise de kippa, soudain, Napoléon s’est circoncis lui-même : schlack ! (on est Napoléon, ou pas !) sous le regard ému du rabbi de Loubavitch, venu spécialement de New York pour la cérémonie.

Sitôt circoncis, notre nouveau Juif s’est ceint le chef de son prépuce en manière de schtraïmel, suscitant l’enthousiasme bruyant du minyan des grognards qui l’escortaient en toutes circonstances. Mais curieusement, cette scène essentielle n’a pas été célébrée. Prudence politique ? goût du secret ? un reste de timidité, probablement…

Toujours est-il que cette conversion renouvelle la compréhension de l’homme et de son épopée. Devenu Juif, il était inévitable que, comme tout Juif qui se respecte, Napoléon se soit pris pour le Messie et que son affaire ait mal tourné comme toutes les aventures messianiques qui se sont succédées au fil des siècles avec, pour finir, une alyah à Sainte-Hélène.

Revenons à la conversion. Sitôt converti, il était logique qu’il se soit mis en quête d’une épouse en accord avec sa nouvelle dignité. C’est pourquoi il a monté une grande expédition en Russie à la recherche d’une petite meïdèlè, une vraie fille cachère de chez nous. Les shatrn locaux, les marieurs, lui ont bientôt trouvé la perle rare, l’héritière d’une prestigieuse dynastie de rabbins miraculeux. Le jour de la noce, les khousn kalè, les fiancés, se dirigeaient déjà vers la khoupa, sous les vivats de la foule des hassidim en liesse, quand le tsar, un vrai antisémite ne supportant pas la joie des Juifs (« le cholera pour lui ! »), s’est empressé de mettre le feu à Moscou.  C’est ainsi que notre pauvre Napoléon a dû s’enfuir sous la neige en plein hiver seulement revêtu de sa kippa, de son tallit et de ses tzitzits. Qu’il ne soit pas mort de froid, est un vrai miracle !

Ensuite, pour se réchauffer, il est allé directement en Espagne. Mais, à peine arrivé, il apprend que : « La Belle de Cadix ne veut pas d’un amant, Chi-ca Chi-ca Chic Ay Ay Ay ! » Protestant de ses intentions honnêtes et la main sur le cœur, il propose à la belle andalouse – une séfarade, mais c’est pas grave – le mariage le plus fastueux avec une somptueuse robe de chez Tati, mais on lui répond que : « La Belle de Cadix est entrée au couvent ! Chi-ca Chi-ca Chic Ay Ay Ay ! » Ah, quel shlimazl ce pauvre Napo !

Là-dessus, ses espions lui signalent que la reine d’Égypte, Cléopâtre, a un grand beau nez juif. Aussitôt séduit, et impétueux comme toujours, il se précipite ventre à terre, à travers la Méditerranée, vers le palais de Louxor où résidait la reine et sa suite. Mais la reine le repousse avec dédain considérant qu’un petit caporal juif était indigne d’elle, elle qui ne rêvait que d’épouser un confectionneur. Profondément vexé par cette prétentieuse shiksè, notre infortuné Napoléon se tapait la théière contre la pyramide !

Pour autant, il ne négligeait pas ses responsabilités militaires et, puisqu’il se trouvait en Égypte, il décida de passer commande aux grossistes de la rue d’Aboukir d’uniformes neufs pour ses régiments. Mais pendant ce temps, ce fourbe de Ramsès, qui en pinçait pour la môme Cloclo, et pour se faire bien voir d’elle, a fomenté une intifada à tout casser. Résultat, sous une pluie de pierres, notre Empereur, courageux mais pas téméraire, a préféré rentrer fissa en France. Tant pis pour le grand nez…

Pour se consoler de tous ses déboires, dans l’espoir de pouvoir un jour être admis parmi les amis de Passages, il prit des cours particuliers de yiddish avec notre chère Rachel Ertel. Mais, malgré les efforts méritoires de celle-ci, il a toujours parlé yiddish avec un fort accent corse, à vrai dire tout à fait savoureux. Comme on regrette que des enregistrements n’aient pas été effectués.

Et quand, au bivouac, il chantait a yiddishe mame, accompagné par les cuivres de la fanfare de la Vieille Garde, son armée entière fondait en larmes. Dans ces conditions, impossible de l’envoyer au combat. D’où la défaite à Vasserloun et sa pitoyable alyah à Sainte-Hélène.

Enfin, les historiens se perdent en conjectures sur la raison pour laquelle il mettait la main dans son gilet. C’est tout simple : il agrippait son porte-monnaie de peur qu’on le lui pique. Certains chercheurs penchent plutôt pour la carte bancaire, voire le portable. Les études en cours trancheront bientôt la question. Ce qui ne l’empêchait pas de demander continuellement à un escogriffe boiteux de son escorte : « T’as les ronds ? – Oui, sire, j’ai du cash. »

Bref, avec le recul de l’Histoire, force est de reconnaitre que Napoléon fut un grand Juif, car grâce au blocus continental et au contrôle de la Baltique il a réussi à sécuriser l’approvisionnement en harengs dont, en vrai yid, il ne pouvait se passer à chaque repas. De même que tous les Juifs qui, pour cette raison, bénissent Napoléon à chaque repas.

Ah, comme sa mère a pleuré quand il a quitté son île ! Elle aurait tant voulu qu’il y reste et apprenne un vrai métier corse, comme gardien de brebis, producteur de saucisson d’âne, contrebandier ou quelqu’autre profession libérale digne de ses aïeux. Mais non, il n’a voulu en faire qu’à sa tête. Et voici qu’il se retrouve mouillant son gilet de ses larmes, prisonnier d’une île lointaine et rêvant à son île natale. « Oï, shepsèlè, voilà ce qui arrive quand on n’écoute pas sa mamè. »

Enfin, pour qui est fidèle à la mémoire de notre Empereur du Sentier, il est scandaleux qu’il croupisse aux Invalides, bien loin du pletzl, dans une tombe d’un parfait mauvais goût, très nouveau riche, privé de toute présence juive et où il ne peut même pas exercer son yiddish, ni avoir un minyan pour la prière.

C’est pourquoi, une pétition internationale est lancée pour exiger le transfert des cendres de notre fameux coreligionnaire au carré juif du cimetière de Bagneux, de façon à ce qu’il puisse, parmi ses frères juifs, dans le caveau de L’amicale des Juifs corsaires, passer le temps à faire des belottes en attendant le shofar annonciateur de la venue du Messie – le vrai, cette fois – (qu’Il vienne aujourd’hui-même ! Oumeïn !).

 

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