De l’inclusion sociale et éducative des autistes
Longtemps, trop longtemps, le handicap fut rejeté de la socialité de celles et ceux qui se considéraient « normaux ». Récemment, la succession à Paris des Jeux Olympiques et des Jeux Para-Olympiques a permis de mesurer l’immense progrès de l’intégration du handicap dans le sport et dans la société. Il fait suite à l’acceptation de la différence de chaque sujet, de chaque citoyen et de la volonté de l’inclure à part entière en l’accompagnant vers l’excellence.
L’automne nous apporte un livre de Patrick Landman qui a pour titre L’inclusion des enfants autistes Une perspective psychanalytique. Émile Malet me fait l’honneur de me proposer d’en faire une recension car il sait que je travaille comme pédopsychiatre depuis plus de 40 ans en EMP puis dans un CMPP. Pendant les premières années nous avons pu travailler avec des autistes grâce à la technique issue de la psychanalyse : C’est lui l’enfant qui doit venir « As Soon As Possible »[1] vers vous armé(e) d’une patience attentive. Aujourd’hui, c’est interdit. La raison la plus entendue de ce désamour, voire de la haine de la psychanalyse dans le traitement de l’autisme est le lien qui y serait faite entre l’enfant autiste et sa mère qui serait ainsi accusée d’en être responsable.
La première originalité du livre de Patrick Landman est d’être préfacé par la maman d’un enfant autiste, Mireille Battut qui a fondé « La main à l’oreille », prélude à une demande de « société inclusive ». La psychanalyse fut, est pour elle un incontestable appui à l’écoute de son fils et de ses liens avec ses parents son frère et l’école qu’elle souhaite ouverte à sa différence. L’autisme est actuellement considéré comme un handicap qui recouvre des tableaux cliniques très différents, depuis l’autisme dit de Kanner et l’autisme de haut niveau. Mais s’inquiète Mireille Battut il y a celles et ceux qui « ne pourront pas tenir dans la compétition » qui pour beaucoup de sujets, autistes ou non, est une « grande souffrance ».
Pour nos deux auteurs, la question majeure de l’inclusion du handicap des enfants autistes est leur insertion dans le milieu scolaire. Patrick Landman insiste sur le nouveau statut juridique qui « s’est modifié, clairement orientée vers une conception sociale et s’éloigne de la conception médicale. La Convention (internationale de 2006) souligne l’égalité des droits dans tous les domaines. »[2]
De fait l’évolution de la conception de la nature de l’autisme a considérablement évoluée depuis la description par de Léo Kanner en 1943 ou la même année du syndrome d’Asperger qui ciblent les deux extrémités cliniques du syndrome. L’autisme a quitté le champ de la psychiatrie pour devenir un handicap.
Pour accompagner ce changement est née la notion de « neurodiversité » qui reflète l’influence grandissante des neurosciences et des sciences cognitives. « Elle tend à supprimer la stigmatisation (et la notion de norme ). Être différent n’est pas synonyme d’être porteur d’un trouble » d’où la facilitation de la notion d’inclusion.
Puis Patrick Landman en vient à définir la perspective psychanalytique. Il attache une grande importance aux écrits de personnes autistes qui nous aident à entrer dans la différence du sujet autistique. Le comportement du psychanalyste n’est pas une attitude naturelle comme l’est celle d’une maman face à un bébé qui cherche d’autant plus à le stimuler par son affection qu’il détourne le regard. Or le principe de la psychanalyse est de laisser le sujet venir à soi petit à petit, étape par étape. Le cas de Mario est éloquent quant à cette démarche. La méthode des « 3i », intensif, individuel, interactif y est déployée donnant toute son importance au jeu, au « play ou game » anglosaxon.
Une question toutefois demeure non traitée, à mon sens dans la question radicale que nous pose l’autisme. Quelles sont les raisons essentielles pour un bébé de naitre avec un handicap ? Les plus parlantes concernent les sens : les enfants sourds et aveugles présentent le plus souvent une incapacité d’un organe sensoriel d’assurer sa fonction. Quel est le système sensoriel en déficit dans l’autisme ? Nous l’ignorons encore et ne pouvons que poser des hypothèses.
Que vienne le temps où des progrès en neurologie nous permettront de mieux appréhender le mystère qu’est encore l’autisme pour pouvoir l’inclure mieux encore dans nos sociétés.
À propos de : L’inclusion des enfants autistes. Une perspective psychanalytique. Préface de Mireille Battut, Stilus
[1] Recommandation fort juste venant aussi bien des USA que des travaux de Marie Christine LasniK
[2] Patrick Landman L’inclusion des enfants autistes Une perspective psychanalytique Collection Résonances Stilus p.49
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