Quelles conclusions peut-on tirer de la COP 27 ?
Robert Diethrich
Accords financiers
Depuis une bonne dizaine d’années les pays en développement, qui sont majoritaires en nombre dans les COP, cherchent en priorité à obtenir des financements pour les dommages que peuvent provoquer les changements climatiques. La COP a entériné un accord sur ces financements, et c’est sans doute le principal résultat de cette COP 27. Plus précisément, en plus du fonds de 100 milliards de dollars par an dont on parle depuis Copenhague (COP 15 en 2009) qui a été une nouvelle fois rappelé, l’accord porte sur un fonds spécifique pour financer les pertes et préjudices dus aux catastrophes naturelles touchant les pays les plus vulnérables.
Bien sûr aucun engagement de payer n’a été pris et on n’a pu que constater qu’on est loin du compte des 100 milliards de dollars annuels qui devaient être atteints en 2020. Aussi un « comité de transition » a été créé pour faire des recommandations en vue de rendre enfin opérationnels ces mécanismes de financement, avec un rapport à présenter à la COP 28 dans un an.
Actions sur le climat
A côté de cela la question climatique parait presque secondaire. Il a été simplement rappelé l’objectif répété depuis la COP de Paris de limiter à 1,5°C la hausse de la température mondiale par rapport aux niveaux préindustriels. Précisons que cette température mondiale est calculée selon une méthode contestable et qu’elle n’a guère de sens pratique, car les évolutions passées du climat montrent toujours des variations plus fortes vers les pôles que vers les régions équatoriales, avec plusieurs degrés d’écart. Pour atteindre cet objectif il est dit qu’il faut réduire les gaz à effet de serre (avec un effort particulier à faire sur le méthane) et aussi qu’il faut s’adapter aux conséquences des changements climatiques (ce qui est devenu le principal axe de travail du GIEC). Notamment il faut établir pour 2030 le « programme d’adaptation de Charm el-Cheikh » pour les communautés les plus vulnérables. Il faut aussi transformer le système financier mondial pour l’orienter vers une économie à faible émission de carbone (bref du charabia diplomatique dont il reste à trouver une traduction pratique).
Les Emirats arabes unis vont gérer un premier inventaire mondial des actions sur le climat à tous les niveaux, nationaux, régionaux et locaux. Cela permettra de faire le point sur la mise en œuvre de l’accord de Paris, ce qui aurait dû être fait en 2020 mais a été bousculé par le Covid.
G7 et réunions des chefs d’Etat
En parallèle à la COP s’est tenu, en plus du G7, un sommet des leaders mondiaux (avec notamment les présidents Biden et Macron) pour trouver des solutions à la sécurité alimentaire et à la transition juste, avec les financements, les ressources et les outils nécessaires. Là aussi le travail reste à faire.
Des actions variées
Une série d’actions ciblées a été définie. Un programme de travail quinquennal pour promouvoir des solutions technologiques climatiques dans les pays en développement a ainsi été lancé. L’accent a été mis sur les travaux pour l’atténuation avec un programme à horizon 2030 visant à réduire l’usage du charbon et à supprimer les subventions accordées aux combustibles fossiles (existant surtout dans les pays en développement).
Un premier bilan mondial des ambitions climatiques doit être fait pour la COP 28.
Un ensemble de 25 actions de collaboration entre divers pays a été lancé dans les domaines de l’électricité, le transport routier, l’acier, l’hydrogène et l’agriculture.
L’ONU a annoncé un plan de 3,1 milliards sur 5 ans pour étendre sur le monde entier les systèmes d’alerte précoce qui ont été entamés il y a près de 20 ans.
Un nouveau partenariat indonésien pour une transition énergétique juste a été annoncé au G20 qui s’est aussi tenu parallèlement à la COP, avec 20 milliards de dollars sur 5 ans.
Un partenariat des leaders sur les forêts et le climat a été lancé visant à unir les actions des gouvernements, des entreprises et des communautés locales pour éviter la dégradation des terres d’ici 2030.
Diversité des participants
Le communiqué officiel de l’ONU dit que 45 000 participants se sont réunis à l’occasion de cette COP avec une forte implication de la société civile, des ONG et des jeunes. Ils ont insisté sur les actions locales, avec un plan d’action quinquennal d’autonomisation climatique et un plan d’action pour l’égalité des sexes. Les jeunes ont fait de nombreuses propositions que l’ONU n’explicite pas. Comme l’a dit le président égyptien en conclusion de cette COP, le monde multilatéral est engagé dans la lutte contre les changements climatiques, malgré de grandes divergences de vues et d’ambitions.
Commentaires personnels
Je suis frappé par la priorité que prennent les objectifs financiers en faveur des pays en développement, les seuls payeurs sollicités étant évidemment les pays développés occidentaux. On comprend mieux les réticences des Etats-Unis qui devraient être les principaux contributeurs, mais qui ne veulent pas financer sans contrôle ces fonds qui pourraient aussi servir aux acquisitions de luxe des dirigeants des pays pauvres (voitures et biens immobiliers par exemple). Et comment faire un contrôle sur l’emploi de ces fonds sans paraitre néo-colonialistes ?
J’observe cependant qu’aucun engagement ferme n’est pris dans ces COP répétées. Le seul protocole contraignant est celui de la COP 3 à Kyoto signé en 1997 et ratifié en 2002, mais sans la Chine, les Etats-Unis et le Canada. De fait il n’a pas été vraiment appliqué.
Les accords de Paris de la COP 21 ne sont pas non plus contraignants, car chaque pays a déclaré ses objectifs pour 2030. L’ensemble conduisait à un réchauffement de plus de 3,5°C selon les modélisations fondées sur les teneurs en CO2. En effet l’Inde et la Chine ne cachaient pas que leur développement nécessitait de doubler d’ici 2030 leurs centrales à charbon, le seul combustible national important dans ces deux pays,.
Cependant il y a toujours de fortes divergences chez les scientifiques, y compris dans le GIEC, sur le rôle effectif du CO2 d’origine humaine : est-il un facteur plus ou moins important des variations climatiques, ou la teneur du CO2 dans l’air est-elle simplement liée à la température des océans ? C’est sans doute pourquoi le GIEC et les COP insistent plus sur les travaux pour s’adapter à ces variations et en atténuer les effets, qui peuvent d’ailleurs être bénéfiques dans certaines régions du globe.
On ne peut que constater que ces débats et ces résolutions sont souvent théoriques ou creux, et n’aboutissent pas assez à des actions concrètes. Il y a même un vocabulaire obscur ou diplomatique quelquefois. Autrement dit les COP peuvent continuer longtemps encore à parlementer sans aboutir à de vraies solutions.
Mais il faudrait en contenir le volume. Il y avait 45 000 participants de tous bords ! Quel gaspillage, est-ce cela la sobriété énergétique et environnementale souhaitable ?
Bref que les COP deviennent des réunions plus denses, plus réalistes, moins politiques ou idéologiques, et moins coûteuses.
Consultant en énergies, ancien directeur général d’EDF International
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Robert Diethrichhttps://lepontdesidees.fr/author/rdiethrich/
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