L’esprit défense
Mohamed Benbrahim
Dans ses Confessions, Saint Augustin écrit : « L’esprit est la mesure du temps. »[1]. Ainsi, face à la multiplication des menaces dues aux bouleversements géopolitiques et politiques, il est fondamental de prendre les mesures qu’impose notre temps, pas uniquement par la consultation de la synthèse de l’expert invité sur le plateau d’une chaîne d’information, mais par une ouverture de nos esprits sur l’esprit défense. Mais « de quoi s’agit-il ? » disait le Marchal Foch.
Il serait prétentieux de donner une définition arrêtée de l’esprit défense, néanmoins, il semble judicieux de pencher son esprit sur la question.
Nous sommes toutes et tous concerné(e)s par la défense, par ce que nous sommes toutes et tous concerné(e)s par la paix qui est une confiance interpersonnelle à construire avec l’institution militaire en ces mêmes temps de paix. Cette confiance que le Colonel Charles Ardant Du Picq qualifie dans « Etudes sur le combat »[2] de “ première et suprême force des armées“ ou encore d’esprit de corps “. En tout évidence, il s’agit ici d’un travail de cohésion nationale en vue d’une intelligente résilience de la Nation. Il est donc nécessaire, avant toutes entreprises, de tourner son regard vers l’histoire de notre pays pour voir émerger une distinction exceptionnelle. Un peuple, qui, dans sa traversée de l’histoire, dans les moments de doute s’est tourné vers son armée qui lui a, par son abnégation, redonné confiance et construire ainsi un trait d’union pour en faire une grande Nation, la France.
Une grande Nation admirée mais une grande Nation enviée.
Être porteur de grandes idées universelles implique une responsabilité riche en enseignements et lourde de charges. L’enseignement le plus marquant est la capacité de se surpasser pour se faire une grande place parmi les nations dans un monde de plus en plus complexe. Lourde de charges, car il faut se doter de toutes les formes d’intelligence pour assurer la pérennité de cette place face à l’appétit vif de certains pays – à niveau de responsabilité douteux- d’acquérir de plus en plus d’armes lourdes. Il y a de quoi se préoccuper pour notre sécurité intérieure et extérieure ainsi que de l’influence à exercer dans le concert des nations pour anticiper notre place dans le monde de demain. A ce propos, dans un texte intitulé « Servir l’Etat aujourd’hui »[3] l’ancien vice-président du Conseil d’Etat Monsieur Jean-Marc Sauvé, invite les élèves de l’ENA à observer les profondes mutations qui interrogent les capacités de l’Etat à pouvoir encore porter un projet collectif. Cette question se pose d’elle-même dans l’époque où les transformations juridiques, sociales, politiques et économiques sont de plus en plus nourris par le droit qui s’internationalise sous l’effet croissant de la globalisation, aussi, ceci impose une réflexion sur le lien susceptible de relier chaque individu à la collectivité et à terme à la Nation. Une fois de plus, la lecture transversale des problématiques qui s’imposent à notre cité, précise, ô combien, le rôle de l’esprit défense est vital dans notre projet commun, cette Nation grande par la richesse de son histoire, cette République fer de lance d’une clairvoyance permanente.
Mohamed BENBRAHIM est juriste, doctorant en Droit public et auditeur de l’IHEDN.
[1] Saint Augustin, XI,28, Les Confessions
[2] Charles Ardant du Picq, Études sur le Combat, Hachette et Dumaine, 1880, sur le site Gallica
[3] Jean-Marc Sauvé, discours à l’École nationale d’administration, Strasbourg, mercredi 14 mars 2018
Juriste, doctorant, Université de Strasbourg
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