Le Pont

La liberté d’opinion est une farce si l’information sur les faits n’est pas garantie. – Hannah Arendt

« On détruit ceux qui veulent nous détruire », entretien avec Olivier Rafowicz*

Le colonel Olivier Rafowicz, porte-parole de Tsahal.

Olivier Rafowicz a remis sa vareuse militaire dès le 7 octobre, date du pogrom opéré par le Hamas dans le sud d’Israël et causant la mort de plus de 1200 personnes, avec ses galons de colonel de l’armée israélienne, Tsahal. Son retour à l’armée n’en fait pas un combattant d’active sur le terrain gazaoui, il exerce son talent comme porte-parole de Tsahal, s’exprimant dans un français à la perfection (ce qui est rare dans la haute hiérarchie militaire) et en refusant d’aborder les questions politiques, notamment le débat concernant la conduite de la guerre par « Bibi » Netanyahou et ce qu’il en résultera politiquement de cette guerre quand les armes auront cessé de faire parler la poudre. « Tsahal est l’armée de défense d’Israël, les soldats de Tsahal protègent le pays et le peuple, c’est un honneur de porter d’uniforme pendant la guerre. C’est une guerre existentielle vue de notre côté ; et qui nous a été imposée par les chefs du Hamas. Nous la conduisons de telle sorte qu’il n’y aura pas deux fois. » Autrement dit, elle cessera quand le Hamas sera défait militairement. 

On n’en saura pas plus sur la conduite de la guerre proprement dite sinon que « la population a une totale confiance dans son armée. » Quand a l’effet de surprise du 7 octobre avec l’ampleur du massacre du Hamas : « La communauté internationale nous a arrête à de multiples reprises lors de nos opérations pour détruire le Hamas. Cette fois, avec une guerre imposée par le Hamas nous avons découvert ce que nous savions déjà. Nous n’avons pas été surpris, le Hamas est un monstre qui a produit avec les millions de subventions accordées aux Palestiniens, une ville sous la ville, une ville interdite aux civils gazaouis. Le Hamas est une pollution idéologique, il abreuve les gazaouis de ce qui le constitue : une idéologie de mort. Le Hamas parle d’Israël comme el yahoud (le juif) ils ne disent pas les Israéliens, ils font la guerre contre les juifs, une guerre des islamistes contre les juifs. »

Olivier Rafowicz ne se prononce pas sur l’autre « monstre », le Hezbollah, sinon pour le considérer encore plus dangereux que le Hamas. Son tour viendra : « no comment ». Le porte-parole de Tsahal prend soin de distinguer le Hamas du contexte arabe régional : « Israël n’a pas l’ambition de transformer le monde arabe. Nous voulons détruire ceux qui veulent nous détruire. » Rafowicz ne s’étend pas sur le sort des otages encore détenus par le Hamas et des manifestations constantes qui se passent à Tel Aviv pou réclamer « maintenant » leur libération. « Les otages constituent avec la conduite militaire de Tsahal deux priorités égales. Nous traitons ce sujet douloureux des otages de manière intensive. » Comment ? on n’en saura pas plus. Certains observateurs avisés de la chose militaire laissent entendre qu’Israël sait où sont enfermés les otages restants, mais qu’une opération militaire directement ciblée serait un carnage humain. Bref, cette guerre qui fait l’objet d’une sur-information ne dit pas grand-chose sur les aspects stratégiques, par ailleurs critiqués par Amos Yadlin, l’ancien patron du renseignement militaire, et ne laisse pas encore entrevoir le jour d’après. Le porte-parole de Tsahal laisse entendre la dimension plus globale de cette guerre contre l’islamisme : « nous menons cette guerre au nom des autres qui n’osent pas la faire. » Vaste programme qui contraint cette région à vivre l’alternance entre paix et guerre. 

Propos recueillis à Tel Aviv le 18/12/2023, par Emile H. Malet

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Journaliste, directeur de la Revue Passages et de l’Association ADAPes, animateur de l’émission « Ces idées qui gouvernent le monde » sur LCP, président de Le Pont des Idées

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