Le Pont

La liberté d’opinion est une farce si l’information sur les faits n’est pas garantie. – Hannah Arendt

Tout près de moi : La figuration introspective de la scène émergente parisienne

1. Maxime Biou, Sans titre, 2022, huile sur toile, 146 x 97 cm

Maxime Biou, Marguerite Piard et Norma Trif, trois peintres figuratifs issus des Beaux-Arts de Paris, sont présentés par les galeries Mathilde Le Coz et Dans les yeux d’Elsa jusqu’au 17 juin à Paris.

Récemment diplômés (respectivement en 2019 et 2020 pour Maxime Biou et Marguerite Piard) ou encore à l’école (Norma Trif achève sa quatrième année), une nouvelle génération d’artistes se concentre sur l’ineffable expression de l’intimité. Une intimité centrée sur soi ou les siens dont chacun tente, à sa manière, de percer le mystère. La chambre devient pour ces artistes le décor tout trouvé : lieu de solitude, de recueillement, de repos et d’amour, elle est un espace à soi, pour soi, qui admet parfois l’autre à qui l’on veut justement partager un peu d’intime.  

Maxime Biou dépouille ses compositions pour ne garder que l’essentiel. L’action passée ou à venir est étouffée par des kilomètres de draps desquels émergent des figures qui détournent le regard. Le poids du silence est aussi palpable que la touche grumeleuse du peintre. Face à l’épaisseur de la douce tension de ses personnages, plongés dans une introspection méditative, le spectateur se fait voyeur d’une scène qui lui échappe mais de laquelle il ne peut se soustraire. 

2. Marguerite Piard, Les éclaircies 2023, huile sur toile 23 x 17 cm

Marguerite Piard, elle aussi, garde l’essentiel. Se focalisant sur des détails – un geste, un infime frottement, une attitude – elle révèle le langage sans mot de la peau contre la peau : un dialogue de chair immédiat, nécessairement sensible – et qui ne trompe pas. Se représentant quasi systématiquement dans ses tableaux, la peintre explore son inconscient au travers d’une dialectique de l’épiderme. Baignée d’une lumière chaude presque mystique, l’artiste expose cette enveloppe qui nous permet de communiquer et d’être avec l’autre. 

3. Norma Trif, Johanna et Hades, 2023, huile sur toile 33 x 41 cm

L’autre, c’est justement ce qui intéresse Norma Trif. Dans sa série de portraits en chambre, l’artiste se fait observatrice de l’intimité de ses sujets, peignant leurs émotions et sentiments. La poussière de marbre qu’elle mélange à sa peinture comme sa palette rose, suave, passée confère à ses œuvres une densité atmosphérique qui ancre ses sujets pour toujours – c’est l’emprunte atemporelle de leur intériorité que l’artiste met en scène.

A l’heure des réseaux sociaux et de la surexposition de la sphère de l’intime, Maxime Biou, Marguerite Piard et Norma Trif ré-épaississent le mystère des liens affectifs et du regard sur soi, peignant ce que les mots peinent à exprimer, donnant matière à l’indicible silencieux de notre intériorité.

 

Une exposition à découvrir jusqu’au 17 juin 2023 présentée par les galeries Mathilde Le Coz et Dans les yeux d’Elsa au 11 rue Michel Le Comte, 75003 Paris. Ouvert du mercredi au samedi de 14h à 19h et sur RDV (0635601107).

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