Le Pont

La liberté d’opinion est une farce si l’information sur les faits n’est pas garantie. – Hannah Arendt

Traquenard financier sur les EHPAD

Depuis Vespasien l’argent n’a pas d’odeur, sauf dans des EHPAD l’odeur de la pisse. Il n’a pas non plus de pudeur. Le placement en EHPAD privé (25% des EHPAD en France) constitue une excellente action. Financière s’entend. Mieux vaut y placer son épargne que ses parents. Le rendement est à deux chiffres, parfois supérieur à 20%, un des plus hauts du marché. Il est plus juteux d’y être actionnaire que pensionnaire. Pour les premiers on jetonne, pour les seconds on rationne. Six ou huit mille Euros de loyer ne suffisent pas à remplir la gamelle, alors on coupe sur les biscottes, deux et pas trois, sur les protections sanitaires, sur le temps consacré à l’hygiène et aux soins, sur les produits d’entretien, sur les personnels soignants. On exploite les personnes âgées comme jadis les mines d’or, aux filous le filon. On cultive les salades pour se faire de l’oseille. Il est suggéré, mais non encore judiciairement démontré donc strictement conjectural, que certain groupe privé gestionnaire d’EHPAD, pourtant largement subventionné par des fonds publics, de l’Assurance Maladie ou des Départements, surfacturerait ses commandes, dont il majorerait ainsi frauduleusement les remboursements. Il se ferait en plus verser des rétro commissions de la part de ses fournisseurs. Pour l’instant aucun démenti, aucune plainte en diffamation, une sorte d’Alzheimer managérial qui n’est sorti de son inconscience que pour limoger le directeur, comme un aveu malgré l’aphasie.

Le scandale (Les Fossoyeurs Victor Castanet, Fayard 2022) n’est pas nouveau. En 2017 déjà, après 117 jours de grève dans un EHPAD (Le Canard enchaîné 02/02/2022) une députée LREM dénonçait les sous effectifs unanimement reconnus, une dégradation importante des conditions de travail, une maltraitance institutionnelle dans certains EHPAD. En 2014, Claude Evin, ancien ministre de la santé, alors directeurs de l’ARS d’Île de France, avait déjà dénoncé, à l’encontre d’un autre groupe privé d’EHPAD, ces rétro commissions. En 2018 avait déboulé sur la toile l’hashtag « Balance ton EHPAD ». Les ARS sollicitées regrettaient la parcimonie  des contrôles inopinés, de 3 à 50 pas an, et l’extrême  rareté des sanctions.

Fautes conjoncturelles ou systémiques ? Les enquêtes en cours cherchent la lumière. Leur cœur de cible restent les EHPAD privés. Force sera malgré tout de  profiter du port du masque pour aller renifler dans les couloirs du public. Un peu de soleil dans l’eau froide? « La vieillesse, soufflait un octogénaire, est un long hiver où les feuilles des arbres sont remplacées par des boîtes de médicaments ». Apparemment sans mode d’emploi.    

Prendre connaissance du rapport de l’ANM apportant de nouvelles solution pour l’EHPAD de demain et émettant des critiques sur la gestion actuelle des EHPAD : https://www.academie-medecine.fr/apres-la-crise-covid-quelles-solutions-pour-lehpad-de-demain/    

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