Nathan Devers sur tous les terrains, de l’IA au judaïsme et à la philosophie
Jean-Luc Favre Reymond
Né un 8 décembre 1997, tout juste âgé de 27 ans, Nathan Devers est le fils de l’éminent neurologue Lionel Naccache, mais aussi ancien élève de l’Ecole Normale Supérieure, agrégé de philosophie et doctorant. Ce jeune prodige intellectuel, se déclare fortement influencé par la pensée de Martin Heidegger et proche de l’incontournable Bernard -Henri Lévy. Il tient à ce titre chronique régulière dans la revue « La Règle du jeu », dont il est éditeur. Il est aussi l’auteur d’un ouvrage intitulé « Généalogie de la religion » publié aux éditions du Cerf en 2019, puis d’un second, « Ciel et terre », paru en 2020 chez Flammarion, suivi d’un troisième, « Espace fumeur » chez Grasset, en 2021. Il est finalement remarqué avec son quatrième titre « Liens artificiels »,paru chez Albin Michel en 2022, sélectionné pour le Goncourt des Lycéens, dans lequel il fait la part belle au « Métavers », sorte d’intrusion plus ou moins heureuse dans le monde carnassier et prolifique du Virtuel, avec en arrière plan l’idée d’une tentative exploratoire se voulant ajuster du mieux possible le fameux concept, à une réalité rythmique et temporellement cadencée, collant au plus près aux innovations technologiques de ce début du XXIème siècle, comme une approche globalisante des enjeux humains et planétaires. Le virtuel fait quoique l’on puisse en dire partie intégrante de nos modes de vie fussent t’il instruits comme un levier inaudible et incertain des nouveaux mondes possibles lié à toute démarche relevant de l’insondable et de l’arbitraire appelant de facto une série de propositions notoires que le philosophe se doit de décrypter afin d’échapper à l’ignorance des différentes chaînes, répondant à des standards techniques et numériques dont Martin Heidegger n’aurait pas à rougir dans leur élaboration, ou mieux encore un Ludwig Wittgenstein. Or infiltrer le Virtuel de manière romanesque impose à son tour quelques règles ; l’inévitable distanciation des procédés, qu’ils soient mathématiques, techniques, économiques ou purement personnels. Univers parallèles en quelque sorte, mais qui valent désormais comme « raison pure » ou presque, incarné par le personnage de Julien Liberat, un anti- héros contemporain dument raté qui (souhaite d’ailleurs se suicider en live sur les Réseaux sociaux), et qui petit à petit se transforme en un double (vengeur), bénéficiaire heureux d’une ouverture providentielle de la réalité technologique et l’Antimonde dont elle est naturellement issue. De quoi faire frémir tout philosophe digne de ce nom. Interface probante, « du je ne sais quoi du presque rien », formule empruntée au philosophe Vladimir Jankélévitch. L’Antimonde ou plutôt le Plurimonde considère une série de possibilités acquises au fait d’une intuition géniale. Quoi de mieux pour échapper au monde ancien devenu par la force des choses complètement inaudible et indicible remplacé par le Virtuel devenu roi. Un royaume aux contours improbables, au service du Moi, avec la prétention de changer les termes de l’histoire. Et vive la controverse !
Etre juif malgré soi !
Une emprise d’autant plus flagrante que le philosophe était initialement destiné au rabbinat. Une discipline fort sérieuse, et qui n’a rien d’artificielle celle-ci, voué à la prosternation illusoire du Dieu absent, sauf évidemment pour le « croyant fou », voué aux flammes éternelles de l’illusion sacrificielle dans l’ombre des Commandements. Et il s’en est fallu de peu pour que le futur philosophe endosse ce lourd fardeau, s’il n’avait rencontré miraculeusement, la philosophie comme une seconde révélation ouvrant sur des perspectives moins austères de la pensée et d’une certaine manière plus ouverte sur le monde. A remarquer toutefois que le judaïsme n’est pas complètement fermé à la philosophie y compris dans l’approche des textes fondateurs. Affaire de méthode et d’interprétation me direz-vous. Le débat est largement ouvert. Il n’empêche que le rabbin échoué claque la porte à sa docte vocation, y compris en changeant de nom, tournant ainsi radicalement le dos à la tradition juive. Ô sacrilège !
Penser contre soi-même
Et voilà que l’auteur récidive avec un cinquième ouvrage justement intitulé « Penser contre soi-même », un titre qui n’est pas anodin, et qui en dit long sur le cheminement intellectuel de son auteur. Un ouvrage inattendu et pour le moins salvateur qui désigne les contours même de l’existence inachevée en flirtant volontairement avec certains usages surannés sans pour autant bouleverser les procédés littéraires et les procédures romanesques : Où comment échapper aux codes en vigueur sans n’ y rien changer, à la manière d’un virtuose intrépide pressé de tout raconter mais sans pour autant griller les étapes d’une vie en train de se faire – où le miroir narcissique devient réalité pourfendeur de l’illusion gratifiante. Penser contre soi-même ou la volonté de contrer l’existant. Car en effet celui qui existe bel et bien, et quel que soit son monde n’a nul besoin de preuves pour montrer qu’il est bien là face à lui-même en dehors de toute fausse provocation intimiste.
Le paradoxe médiatique ou le joli furet !
Non seulement d’écrire des articles absorbants et souvent pertinents dans la Règle du jeu, Nathan Devers investit désormais les grands médias, Comme sur CNews par exemple, ou dans Vivement Dimanche, l’émission culte grand public de Michel Drucker. On est alors en droit de se demander ce qui a poussé le philosophe à épouser la toile avec pour le coup une élocution irréprochable, et pour le moins compréhensible pour le tout-venant. Rompre avec un élitisme forcené, réservé principalement aux amateurs de philosophie ou aux professionnels rasoirs de la culture. Le philosophe bluffe-t-il en s’inventant un nouveau personnage déridé échappant ainsi à ses propres contradictions ou cheminement logique dans une société narcotique et débridée. Histoire de pouvoir dire et affirmer que finalement tout à un sens quel qu’en soient les motivations et les moyens. Penser contre soi même, devient alors penser pour soi-même, sans travestissement aucun. Juste dire ce qu’il y a dire, dans le souci du bref éclaircissement, pourvu de viser juste. A ce stade, Nathan Devers peut être sans conteste considéré comme un Sujet Pensant Non Identifié (SPNI).
Ecrivain, journaliste. Chercheur-associé auprès du Centre d’Etudes Supérieures de la Littérature de Tours.
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